Une Maladie Morale
r et ses
, présente des aspects variés, si leur caractère et leurs ?uvres comportent des nuances nombreuses, il n'en est pas d
temps, il perd ses parents, sa femme, sa santé et sa fortune, et se voit réduit à chercher des moyens de vivre dans un travail qui lui répugne. Cependant il retrouve assez de liberté pour écrire, de 1798 à 1804, ses Rêveries sur la nature primitive de l'homme, et, en 1804, son livre d'Obermann, ouvrages qui, par l'esprit général qui les anime, par leur forme, par le titre de l'un d'eux, par l'emploi fréquent de l'apostrophe, rappellent l'influence de Rousseau. Mais, écrire n'était pour lui qu'un dérivatif insuffisant à ses douleurs. On ne saurait dire de ses ouvrages comme de ceux de Chateaubriand, que leur auteur y soulageait ses chagrins par la verve qu'il déployait à les décrire. Philosophe plut?t que poè
ie des c?urs sensibles et des c?urs infortunés, tu conserves et adoucis les sentiments tristes et précieux de nos pertes et de nos douleurs; tu nous fais reposer dans le mal même, en nous apprenant à souffrir facilement, sans résistance et sans amertume; tout ton aspect délicieux et funèbre attache nos c?urs aux souvenirs des temps écoulés, aux
ilieu de la société, contrarier la destinée véritable de l'homme. Il a échappé par la fuite au joug d'une profession pratique qu'on lui vo
e de souffrance. On le voit passant une nuit entière, absorbé dans ses pensées, sur le bord d'un lac éclairé par la lune. ?Indicible sensibilité, s'écrie-t-il, charme et tourment de nos vaines années, vaste conscience d'une nature partout accablante et partout inspirée, trouble, passion universelle, sages
eux pas qu'ils s'éteignent; ce silence absolu serait plus sinistre encore. Cependant c'est la vaine beauté d'une rose devant l'?il qui ne s'ouvre plus. Si l'espérance semble encore jeter une lueur dans la nuit qui m'environne, elle n'annonce rien que l'amertume qu'elle exhale en s'éclipsant; elle n'éclaire que l'étendue de ce vide où je cherchais et où je n
à ceux qui, le matin de leurs jours, ont trouvé leur éternelle nuit; ce sentiment me repose et me console, c'est l'instinct du soir.? Il examine alors les objections qui s'élèvent contre le suicide: les devoirs envers l'amitié, la patrie, l'humanité. Il croit les réfuter par cette raison que, quand on se sent incapable de remplir un r?le dans le monde, on peut quitter volontairement la vie, et que le pouvoir de la société ne va pas jusqu'à interdire à l'homme de disposer de lui-même. Comme si l'être le plus humble ne pouvait faire quelque bien sur la t
Les projets utiles qu'il n'a pas encore eu le courage d'exécuter, il veut enfin les accomplir. Redevenu riche, il forme un établissement agricole qui fournit un noble aliment et à son activité et à sa bienfaisance. Outre ce généreux emploi d'une partie de ses heures, il en consacre une autre
vaux de Senancour sur la solitude, et pour ne pas scinder l'étud
n raconte les charmes; selon lui, elle procure à l'esprit la modération et la santé, l'oubli des choses vaines, la continuité dans la possession de soi-même. Voilà sans doute de grands avantages, et celui qui parle ainsi semble entièrement satisfait de son état. Cependant, il ne le dissimule pas, il reste en lui un fond d'inquiétude, un levain de chagrin et d'ennui toujours prêt à se soulever. Il ne peut l'étouffer que par le travail, quelquefois le plus rude; pour dompter son ame, il faut qu'il épuise ses forces physiques. ?Je me haterai, dit-il, de saisir la bêche ou le rabot: je ne les quitterai pas avant d'y être contraint par le sommeil. Que de fois je me félicitai d'une vigueur qui me rendait cette diversion facile. Je plains celui dont la
in d'y trouver la paix qu'elle en attendait. Bien vite désabusée sur les suites de sa bizarre tentative, elle ne fait rien cependant pour rentrer dans la vie commune. Elle ne sait pas plus supporter la situation qu'elle s'est faite, que la rompre. Elle n'accepte ni ne repousse, soit l'amour, soit l'amitié, et elle meurt n'ayant su remplir ni complètement, ni à temps, les devoirs qui lui étaient imposés. Sans entrer dans une analyse plus étendue, citons quelques fragments de ses lettres: ?Que je souffre plus ou moins, ce ne sera pas une différence réelle dans le cours du monde. Que te dirai-je? Comment me faire entendre? je ne connais pas bien ce que j'éprouve, et il est possible que j'aie peu de raison de croire ce dont je reste persuadée... tout m'obsède, tout m'irrite.
side à l'existence et à l'?uvre de Sen
'a-t-il pas travaillé lui-même à son infortune, en s'isolant volontairement, en se dérobant au train commun des choses pour lequel il ne se croyait pas fait, et en se consacrant à un genre de v
as oisive; elle est, au contraire, remplie de labeurs où le travail du corps alterne avec celui de l'intelligence. Elle n'est pas
e formelle. Mais, reconnaissons-le, jamais il n'atténue aucun des arguments qu'on lui peut opposer, et il ne cherche pas à pallier les c?tés faibles de ses théories. A c?té de son opinion sur le suicide, il expose conscie
uprême félicité.? Après lui, Zimmermann préconisait aussi, comme le grand moyen de bonheur, l'occupation dans le calme. Mais, mieux encore que ces deux écrivains, Chateaubriand a dit la même chose par la bouche de René: ?On m'accuse d'avoir des go?ts inconstants, de ne pouvoir jouir longtemps de la même chimère, d'être la proie d'une imagination qui se hate d'arriver au fond de mes plaisirs, comme si elle craignait d'être accablée de leur durée; on m'accuse de passer toujours le but que je puis atteindre, hélas! je cherche seulement un bien inconnu dont l'instinct me poursuit. Est-ce ma faute si je trouve partout des bornes, si ce qui est fini n'a pour moi aucune valeur? Cependant, je sens que j'aime la monotonie des sentiments de la vie, et si j'avais encore la folie de croire au bonheur, je le chercherais dans l'habitude.? C'est cette même solution de la paix par l'ordre que Senancour vient apporter au problème du bonheur. ?Il nous faudrait, fait-il dire à Obermann, il nous faudrait une volupté habituelle et non des émotions extrêmes et passagères. Il nous faudrait la t
d'esprit délicat, a été, enfin, présenté au vrai public. Mme Sand lui a consacré une étude enthousiaste qui a eu du retentissement et qui a donné, en quelque sorte, le mouvement à l'opinion. Plus tard, Sainte-Beuve a parlé de lui avec étendue, avec éloge. Un poète anglais, M. Arnold, lui a
Cependant, si l'on n'avait tant abusé de cette expression, je dirais qu'il eut, à son insu, des frères ob
hilosophique, une certaine illustration. Les affaires publiques qui ont pris une part considérable de la vie de Maine de Biran, ne l'ont pas, en ef
forcée de la dissipation qui avait marqué sa jeunesse. Les récentes publications dont il a été le sujet nous font conna?tre qu'il avait,
ris. Cet asile lui offrait un double avantage: il lui voilait le spectacle des folies sanguinaires qui désolaient la France, et il lui permettait de se consacrer à l'étude de lui
emps ou de sa santé. Il est aussi un certain état qu'il gémit d'éprouver trop souvent: ?En cet état, dit-il, absolument incapable de penser, dégo?té de tout, voulant agir sans le pouvoir, la tête lourde, l'esprit nul, je suis modifié de la manière la plus désagréable. Je me révolte contre mon ineptie, j'essaie pour m'en sortir de m'appliquer à diver
la stabilité de l'ame, à la permanence des sentiments intimes. Comme lui aussi, il n'a trouvé le calme qu'en donnant plus de place dans ses pensées à l'élément religieux, en s'élevant davantage vers l'esprit du
1794, les Mélancolies d'un solitaire; en 1800, les Nuits élyséennes. Ces écrits sont des méditations sentimentales sur les clairs de l
t surtout sur l'agriculture, Thiébaut avait, en 1798, fait para?tre Un voyage à l'Ile des Peupliers, hommage ardent à la mémoire et au génie de Rousseau, dans le go?t de celui que lui avaient déjà rendu Mme de Sta?l et M. Michaud. On en prendra une juste idée par cet éloge qu'en fait, dans un style qui p
ore jusqu'à ce que, par la mort du dernier homme, la terre entre enfin dans l'éternel repos, dans ce vaste et sombre tableau, on a retrouvé ?l'expression agrandie de la tristesse d'Obermann.? Cette ?uvre, du reste, quoiqu'elle f?t fort estimée par Bernardin de Saint-Pierre, et qu
présentent avec lui le plus de ressemblance,