Une Maladie Morale
e de Cha
OLLé.-Mme DE CAUD (LUCILE).-Mme DE BE
attachant à lui et s'inspirant de ses sentiments. Cet entourage ne lui a pas fait défaut. Sainte-Beuve a étudié et analysé avec sa sagacité ordinaire ?le groupe littérair
après de longs orages, et dont quelques membres s'appelaient entre eux ?les corbeaux.? Le souvenir des événements qu'ils avaient traversés ne contribuait pas peu à donner à leurs pensées une teinte sombre. Ils étaient, de plus, dans cet état que Chateaubriand indique avec raison comme particulièrement accessible à la mélancolie, ?celui qui précède le développement des passions, lorsque nos facultés jeunes et actives, mais renfermées, ne se sont exercées que sur
ou des poésies. Comme la plupart des rêveurs, il avait pris l'habitude de tenir registre de ses pensées: il écrivait un journal de sa vie. Ce soin de s'observer sans cesse, d'analyser ses moindres impressions, lui devint funeste; il sentit le danger de c
nt?t en amitié, avec Chateaubriand; présenté à sa s?ur Lucile, veuve alors, il con?oit pour elle une affection profonde et forme le v?u de s'unir à cette femme si digne d'être aimée. Mais ce projet auquel, sans l'en
pouvais rendre un peu de repos à une imagination malade et sortie des voies de la nature.? Maladie de l'imagination, tel était le terme auquel aboutissait une vie trop solitaire et trop
elle se voulait ensevelir dans un clo?tre. Tout lui était souci, chagrin, blessure: une expression qu'elle cherchait, une chimère qu'elle s'était faite, la tourmentaient des mois entiers.? Dans le triste manoir de Combourg, où Lucile et son frère étaient l'un pour l'autre un soutien et une consolation, ses distractions étaient celles que Chateaubriand a décrites avec tant de charme en retra?ant ses propres souvenirs: ?Jeunes comme les primevères, tri
même source. Mais l'union si douce des premières années se relacha bient?t. Pendant que Chateaubriand est entra?né au loin par sa fortune et son humeur, sa s?ur reste en France et y continue obscurément l'existence à laquelle e
rire faisaient sur moi la même impression que le rire d'un homme attaqué par la folie: ils conservaient par un contraste terrible toute l'amertume de la tristesse, et sur ce visage si mélancolique la ga?té même semblait malheureuse.? On put cependant croire un instant qu'elle allait consentir à répondre aux v?ux de Chênedollé; mais elle s'effrayait à cette pensée, et se hatait de reprendre à son ami désolé l'espoir qu'elle avait pu lui laisser entrevoir. Qu
andonne qu'à demi à ce bonheur, et une pensée de défiance, une crainte secrète d'être importune, trouble la douceur de cette amitié. Dans cet état, tout flotte et tourbillonne dans son esprit, et sa pensée elle-même lui échappe: ?Mon ami, j'ai dans la tête mille idées contradictoi
n insensé qui édifierait une forteresse au milieu d'un désert.? Elle se plaignait de la longueur de son épreuve dans ces termes, où la profondeur des sentiments atteint la véritable él
rs publics, telle est l'explication de la tristesse de Mme de Caud. Les mêmes causes et les mêmes effets se re
s'étaient emparés d'elle. ?Je suis bien aise de vous dire, lui écrit M. Joubert, en 1795, que je ne pourrai vous admirer à mon aise et vous estimer tant qu'il me plaira, que lorsque j'aurai vu en vous le plus beau de tous les courages, le courage d'être heureuse. Il faudrait, pour y atteindre, avoir d'abord le courage de vous soigner, le désir de vous bien porter et la volonté de guérir. Je ne vous en croirai capable que lorsque vous aurez bien perdu votre bel
ie. Mme de Beaumont analysait, dans les lignes suivantes d'une lettre à M. Joubert, l'état de son ame vers cette époque: ?Je vous ferais pitié: j'ai retrouvé ma solitude avec humeur; je m'occupe avec dégo?t, je
er une magnifique sépulture où elle était représentée ?couchée sur le marbre et indiquant du doigt, au-dessous du nom de ses proches tombés sous la hache révolutionnaire, cette plainte suprême, qu'elle ava
le génie, ne s'effacera pas. En elles, nul sentiment qui ne brave la critique. Leur tristesse est exempte de cet égo?sme, qui, chez tant d'autres, rabaisse ce sentiment. Loin de se rechercher elles-mêmes, elles se so
Il l'avait connu en 1801, dans un voyage qu'il avait fait à Paris. Il lui avait demandé sa collaboration pour la publication d'une bible fran?aise avec des discours. En 1804, il l'av
porta sans trop d'angoisses le temps du siège de Lyon, mais la Terreur qui suivit l'accabla. Il s'enfuit à la campagne avec sa mère et il y subit toutes les privations. Revenu à Lyon après le 9 thermidor, il eut à traverser une maladie pénible et
e M. Ballanche, quelque chose de douloureux et d'ébranlé.? Les souvenirs de ces jours néfastes lui inspirèrent une épopée en prose sur les martyrs de Lyon pendant la Révolution. Il publia aussi, en 1801, un volume intitulé: Du Sentiment, considéré dans la littérature et dans les arts. On y remarque, ?quoique souvent l'espérance y domine, dit Sainte-
tement de c?ur.? Le public, distrait des choses littéraires par la guerre d'Italie, ne s'était pas occupé de son livre. Des douleurs phy
conciliable avec une religion élevée.? Il prête au jeune homme les pensées les plus désolantes sur la vie, et il montre bien qu'elles lui étaient habituelles à lui-même, quand il ajoute: ?Le fond de cette ame n'avait pas échappé à tous. Ceux qui avaient passé par les mêmes épr
: ?Nous serions bien moins étonnés de souffrir, dit-il, si nous savions combien la douleur est plus adaptée à notre nature que le plaisir. Il n'y a de réel que les larmes.... Montrez-moi celui qui a pu arriver à trente ans sans être détrompé... montrez-le moi! Un déluge de maux couvre la terre, une arche flotte au-dessus des eaux, comme jadis celle qui portai
pas tardé à sentir le vide de son absence. ?Descendu, on l'a très bien dit, au fond de l'ab?me, il chercha à remonter vers le ciel, et c'est un des spectacles moraux les plus intéressants que celui qu'offrent les lettres où il nous peint ses regrets, ses
ouillé de ses éléments mauvais. Pur dans son origine, il resta toujours inoffensif dans ses effets, et ne se traduisit jamais pa