Histoire des Musulmans d'Espagne, t. 1/4
a et de Ba?ra se rappelaient encore, en la regrettant, cette époque anarchique, ce bon temps comme ils disaient, alors qu'entourés de dix ou vingt clients[230], ils se pavanaient dans les rues, la têt
ent mille pièces d'argent à celui qui vint lui réciter un poème à sa louange, et cent mille autres à un second qui vint lui dire qu'il était l'auteur de ce poème[231]. Il éclipsait donc tous les gouverneurs par son luxe, son opulence princière et sa générosité sans bornes, aussi bien que par l'éclat de sa renommée et de sa puissance. ?Les Arabes de cette ville n'ont des yeux que pour cet homme,? disait tristement l'Omaiyade Khalid[232], le premier gouverneur de Ba?ra après la restauration; et il rappela Mohallab du théatre de ses exploits, le condamna à l'inaction en lui donnant l'Ahwaz à gouverner, et confia le commandement de l'armée, forte de trente mille hommes, à son
chargé un de ses affidés de lui rendre compte, jour par jour, de tout ce
i cria Mohallab d'auss
aise d'apprendre:-il a été battu e
aise d'apprendre qu'un Coraichite a été battu
u chagrin ou de la joie; la nouvel
érience de la guerre, sait prévoir tous les périls et les écarter[234].? Khalid se résignait à entendre ces reproches, de même qu'il s'était déjà accoutumé à la pensée de la honte de son frère; mais s'il était peu susceptible sur le point d'honneur, en revanche il tenai
us qu'Abdalmél
ent le général, qui lui gardait trop de ranc
craindre quelque chose de plus fache
prendra que votre frère Abdalaz?z a été battu par les non-conformistes de la Perse,
r sa conduite ridicule et coupable, lui annon?ait sa destitution, et terminait en disant: ?Si je vous punissais comme vous le méritez, je vous ferais éprouve
neur de Coufa, au gouvernement de Ba?ra, en lui ordonnant de donner le command
chef naturel de cette race dans l'Irac. Aussi, quand il eut re?u l'ordre du calife, il entra dans une grande fureur et jura qu'il tuerait Mohallab. Son premier ministre, Mousa ibn-No?air (le futur conquérant de l'Espagne)[235], eut grand'peine à
ses respects.? Bichr crut alors avoir trouvé dans l'indisposition du général un excellent prétexte pour se dispenser de le mettre à la tête des troupes. Ses flatteurs ne manquaient pas de lui dire que, étant gouverneur, il avait bien le droit de nommer lui-même un général; cependa
Abdalmélic eut un entretien particulier avec
es-moi donc franchement quel est, à votre avis, le général qui possède les
ite, Ibn-Hak?m répondit sans
malade, rep
n-Hak?m avec un sourire malin, qui l'
le calife; Bichr veut entrer
, d'un ton impérieux et absolu, de mettre Mo
z à conserver mon amitié, faites ce que je vais vous dire: désobéissez à tous les ordres que vous donnera ce barbare de l'Oman, et faites en sorte que toutes ses mesures aboutissent à un fiasco misérable.? Ibn-Mikhnaf s'inclina, ce que Bichr prit pour un signe d'assentiment; mais il s'était adressé mal. De la même race,
Ba?ra, les soldats de Coufa se révoltèrent contre leur général Ibn-Mikhnaf, et désertèrent en masse pour retourner à leurs foyers. La plupart des soldats de Ba?ra imitèrent leur exemple. Jamais, dans cette guerre si longue et si opiniatre, le danger n'avait été plus imminent. L'Irac était en proie à l'anarchie la plus complète; il n'y avait pas la moindre ombre d'autorité et de discipline. Le lieutenant de Bichr à Coufa avait fait menacer les déserteurs de la mort s'ils ne retournaient pas à leur poste: pour toute ré
e choix du calife était mauvais, comme tous ses
ic nomma
on regard faible et incertain (car il avait la vue courte[238]) sur l'auditoire, sans proférer une parole. Prenant ce silence prolongé pour de la timidité, les Iracains s'en indignèrent, et comme ils étaient, sinon braves en action, du moins fort insolents en paroles, surtout quand il s'agissait d'insulter un gouverneur, ils se disaient déjà: ?Que Dieu confonde les Omaiyades, puisqu'ils ont confié le gouvernement de notre
acle, je le brise. Pour que l'on me c
d'une voix lent
e moissonneur, ce sera moi... Entre les turbans et les barb
s'animant
fait galoper ventre à terre en les effrayant par le bruit d'une outre vide et desséchée. De même que l'on examine la bouche d'un cheva
s.... Depuis bien longtemps vous marchez dans la voie de l'anarchie et de la révolte; mais je le jure! je ferai de vous ce que l'on fait de ces buissons épineux dont on veut se servir comme de bois de chauffage, et que l'on entoure d'une corde pour les couper ensuite[239];-je vous rouerai de cou
où vous combattrez sous les ordres de Mohallab. Je vous donne trois jours pour faire vos préparatifs, et je jure pa
me, lis-leur la lettre du
part d'Abdalmélic, le commandeur des croyants
te fois l'auditoire garda un morne silence. Bien qu'on sent?t instinctivement qu'on avait trouvé un ma?tre dans cet o
nt donc, s'écria-t-il, le commandeur des croyants vous salue et vous ne lui répondez ri
son de sa voix, une expression si mena?ante et si terrible, que, quand le lecteur pronon?a de nouveau les p
allab[241], et ce général, agréablement surpris du zèle bien insolite des Iracains, s'écria dans l'élan de sa joie: ?Dieu soit loué! A la fin un homme est arrivé dans l'Irac[242].? Mais aussi, malheur à celu
emmes; s'ils n'avaient été retenus par la crainte du calife, ils l'auraient tué. Pourtant il ne faiblit pas un instant. Repoussant avec indignation les conseils de ses amis qui voulaient qu'il entrat en pourparlers avec les rebelles: ?Je ne le ferai que quand ils m'auront livré leurs chefs,? dit-il fièrement et comme s'il e?t été le ma?tre de la situation. Selon toute probabilité, il aurait payé de sa vie son opiniatreté inflexible, si, en ce moment critique, les Caisites l'eussent abandonné à son sort; mais ils avaient déjà reconnu en lui leur espoir, leur soutien, leur chef; ils avaient compris qu'en suivant la ligne de conduite qu'il leur tra?ait, ils se relèveraient de leur abaissement et reviendraient au pouvoir. Trois chefs caisites, parmi lesquels on distingu
aient soutenu le pouvoir, et, une fois engagés dans cette voie, ils y marchèrent résolum
qu'il appelait sa lenteur, son inaction, sa lacheté, mena?a de le faire mettre à mort ou tout au moins de le destituer[245], et envoya coup sur coup des commissaires au camp[246]. Appartenant à la race du gouverneur et possédés de la rage de donner des conseils, surtout quand on ne leur en demandait pas, ce
de s'appuyer soit sur les Kelbites, soit sur les Caisites, le choix du calife ne pouvait être douteux. Les rois ont d'ordinaire peu de go?t pour ceux qui, ayant contribué à leur élévation, peuvent prétendre à leur reconnaissance. Les services qu'ils avaient rendus avaient inspiré aux Kelbites une fierté qui devenait importune; à tout propos ils rappelaient au calife que, sans eux, ni lui ni son pèr
ussent se révolter contre lui; mais leurs poètes lui reprochaient amèrement son ingratitude et ne lui épargnaient pas les mena
an? Si Ibn-Bahdal n'avait pas assisté à l'assemblée qui s'y est tenue, tu vivrais ignoré et personne de ta famille ne réciterait dans la mosquée la prière publique. Et pourtant, après que tu as obtenu le pouv
tre poème
tre, nous les avons combattus avec nos lances et nos épées, et nous avons écarté le danger qui vous mena?ait. Dieu peut-être nous récompensera de nos services et de ce qu'avec nos armes nous avons affermi ce tr?ne, mais bien certainement la famille d'Omaiya ne nous récompense
auparavant avaient chanté la victoire de
bons et loyaux services; auparavant vous étiez bons pour nous: gardez-vous de devenir pour nous des tyrans. Même avant Merwan, lorsque les yeux d'un émir omaiyade étaient couverts de soucis comme d'un voile épais, nous avons déchiré ce voile, de sorte qu'il a vu la lumière; quand il était déjà sur le point de succomber et qu'il grin?ait les
es Kelbites continuèrent à jouer un r?le important, surtout en Afrique et en Espagne; mais jamais ils ne redevinrent ce qu'ils avaient été sous Merwan, la plus puissante parmi les tribus yéménites. Ce rang appartint désorma
t fourni des prétextes fort plausibles à la haine de Haddjadj. Comme tous les membres de sa famille, la plus libérale de toutes sous le règne des Omaiyades, de même que les Barmécides l'ont été sous les Abbasides[256], il semait l'argent sur ses pas, et, voulant être heureux, et que tout le monde le f?t avec lui, il gaspillait la fortune dans les plaisirs, dans l'amour des arts et dans les imprudentes largesses de sa munificence tout aristocratique. Une fois, dit-on, se trouvant en route pour faire le pèlerinage de la Mecque, il donna mille pièces d'argent à un barbier qui venait de le raser. Stupéfait d'avoir re?u une récompense si considérable, le barbier s'écria dans sa joie: ?Je m'en vais de ce pas racheter ma mère d'esclavage.? Touché de son amour filial, Yéz?d lui donna encore mille pièces. ?Je me condamne à répudier ma femme, reprit aussit?t le barbier, si de ma vie je rase une autre personne.? Et Yéz?d lui donna encore deux mille pièces[257]. On raconte de lui une foule de traits semblables, qui montrent tous qu'entre ses doigts prodigues l'or s'écoulait comme l'onde; mais comme il n'y a point de fortune, si énorme qu'elle soit, qui tienne contre une prodigalité poussée jusqu'à la folie, Yéz?d s'était vu forcé, pour échapper à la ruine, d'usurper sur la part du calife. Condamné par
Le calife ayant exigé cent mille pièces d'or pour son indemnité, Abdalaz?z paya la moitié de cette somme, et, dans la suite, il nomma Mousa au gouvernement de l'Afrique, car à cette époque le gouverneur de cette province était nommé par le gouverneur de l'Egypte[261]. Après avoir conquis l'Espagne, Mousa, gorgé de richesses, au comble de la gloire et de la puissance, continua d'usurper sur la part du calife avec la même hardiesse qu'auparavant. Il est vrai que tout le monde alors dans les finances faisait des affaires; le tort de Mousa fut d'en faire plus qu'un autre, et de ne pas appartenir au parti dominant. Depuis quelque temps Wal?d avait l'?il sur ses procédés; il lui ordonna donc de venir en Syrie rendre compte de sa gestion. Aussi
créatures, ses amis avaient encore tous les postes: ils furent destitués sur-le-champ et remplacés par des Yéménites. Yéz?d ibn-ab?-Moslim, affranchi et secrétaire de Haddjadj, perdit le gouvernement de l'Irac et fut jeté dans un cachot, d'où il ne sortit que cinq ans plus tard, lors de l'avénement du calife caisite Yéz?d II, pour devenir aussit?t gouverneur de l'Afrique[264], tan
ayant pas consenti à cette demande, et les fils de Wal?d ayant hérité par conséquent des cadeaux qu'il avait faits à leur père, Solaiman lui gardait rancune[265]; il ne lui remit donc point l'amende à laquelle il avait été condamné, et que d'ailleurs il pouvait acquitter facilement avec l'aide de ses nombreux clients d'Espagne[266] et des membres de la tribu de Lakhm, à laquelle appartenait son épouse[267]. Solaiman ne poussa pas plus loin sa vengeance. Il y a bien, sur le sort de Mousa, une tra?née de légendes, les unes plus touchantes que les autres, mais elles o
nestes. Uniquement préoccupé des intérêts religieux et de la propagation de la foi, il rappelle cet excellent et vénérable pontife qui disait aux Florentins: ?Ne soyez ni gibelins ni guelfes, ne soyez que chrétiens et concitoyens!? Pas plus que Grégoire X, Omar II ne réussit à réaliser son rêve généreux. Yéz?d II, qui lui succéda et qui avait épousé une nièce de Haddjadj, fut Caisite. Puis Hicham monta sur le tr?ne. I
violences les plus atroces. C'est ce qui arriva après la mort de Bichr le Kelbite, gouverneur de l'Afrique. Avant de rendre le dernier soupir, ce Bichr avait confié le gouvernement de la province à un de ses contribules, qui se flattait, à ce qu'il se
lorsque tout à coup ses amis se précipitent dans sa chambre, en criant: ?L'émir Obaida vient d'entrer dans la ville!? Atterré du coup, le Kelbite, d'abord plongé dans une stupeur muette, n
ui, Cairawan n'avait point de murailles, et, marchant avec ses Caisites par des chemins détournés et dans le plus profond
Après les avoir fait jeter dans des cachots, il les mit à la torture, et, afin de
calife Abdalmélic son ingratitude envers les Kelbites, dont la bravoure dans la bataille de la Prairie avait décidé du sort de l'empire et procuré le tr?ne à Merwan. Le supplice de Sad fit frémir les Kelbites d'indignation, et quelques-uns d'entre eux, tels qu'Abrach, le secrétaire de Hicham[275], qui n'avaient pas perdu toute influence à la cour, l'employèrent si bien que le calife consentit à envoyer en Espagne un certain Mohammed, avec l'ordre de punir Haitham et de donner le gouvernement de la province au Yéménite Abdérame al-Ghafik? qui jouissait d'une grande popularité. Arrivé à Cordoue, Mohammed n'y trouva pas Abdérame, qui s'était caché pour se dérober aux poursuites du tyran; mais, ayant fait arrêter Haitham, il lui fit donner des coups de courroie et raser la tête, ce qui était alors l'équivalent de la peine de la flétrissure; puis, l'ayant fait charger de fers et placer sur un ane, la tête en arrière et les mains liées sur le dos, il ordonna de le promener par la
s poitrines qui vous servaient de boucliers contre les lances ennemies, et vous n'aviez alors que nous pour cavaliers et pour fantassins. Mais depuis que vous avez obtenu le but de vos désirs, et que, grace à nous, vous nagez dans les délices, vous affectez de ne pas nous apercevoir; voilà comment, depuis aussi longtemps que nous v
vile eut tant d'effet sur le calife, qu'il pronon?a à l'instant même la destitution d'Obaida, en s'écriant avec une