Histoire des Musulmans d'Espagne, t. 1/4
pement, l'immobilité est le caractère distinctif des innombrables peuplades qui parc
t encore dans toute sa pureté l'esprit qui animait leurs ancêtres au temps de Mahomet, et les meilleurs commentaires sur l'histoire et la poésie des Arabes pa
sation, il ne veut pas échanger son sort contre un autre. Dans son orgueil le Bédouin se considère comme le type le plus parfait de la création, méprise les autres peuples parce qu'ils ne lui ressemblent pas, et se croit infiniment plus heureux que l'homme civilisé. Chaque condition a ses i
se qu'un autre membre de la tribu ne pourrait le faire. Dans toute circonstance il est tenu de consulter le conseil de la tribu, qui se compose des chefs des différentes familles. Sans l'assentiment de cette assemblée, il ne peut ni déclarer la guerre, ni conclure la paix, ni même lever le camp[2]. Quand une tribu décerne le titre de chef à l'un de ses membres, ce n'est souvent qu'un hommage sans conséquence; elle lui donne par là un témoignage public de son estime; elle reconna?t solennellement en lui l'homme le plus capable, le plus brave, le plus généreux, le plus dévoué aux intérêts de la communauté. ?Nous n'accordons cette dignité à personne, disait un ancien Arabe, à moins qu'il nous ait donné tout ce qu'il possède; qu'il nous ait permis de fouler aux pieds tout ce qui lui est cher, tout ce qu'il aime à voir honoré, et qu'il nous ait rendu des services comme en ren
oine en bienfaits, tel est l'idéal du chevalier arabe[7]. Ce dédain de la richesse est sans doute une preuve de grandeur d'ame et de véritable philosophie; cependant il ne faut pas perdre de vue que la richesse ne peut avoir pour les Bédouins la même valeur que pour les autres peuples, puisque chez eux elle est extrêmement précaire et se déplace avec une étonnante facilité. ?La richesse vient le matin et s'en va le soir,? a dit un poète arabe, et dans le Désert cela est
n que toutes les autres créatures humaines. Puis les inégalités naturelles entra?nent des distinctions sociales, et si la richesse ne donne au Bédouin aucune considération, aucune importance, la générosité, l'hospitalité, la bravoure, le talent poétique et le don de la parole lui en donnent d'autant plus. ?Les hommes se partagent en deux classes, a dit Hatim; les ames basses se plaisent à amasser de l'argent; les ames élevées recherchent la gloire que procure la générosité[9].? Les nobles du désert, les rois des
fection, pourvu que ceux-ci, s'ils n'ont pas re?u du ciel les mêmes dons que leurs a?eux, conservent au moins dans leur ame le respect et l'amour des hauts faits, des talents et de la vertu. Avant l'islamisme on considérait comme fort noble celui qui était lui-même le chef de sa tribu, et dont le père, l'a?eul e
vengeance. Rien ne saurait donner une idée assez nette, assez vive, de cette a?ab?a, comme il l'appelle, de cet attachement profond, illimité, inébranlable, que l'Arabe ressent pour ses contribules, de ce dévo?ment absolu aux intérêts, à la prospérité, à la gloire, à l'honneur de la communauté qui l'a vu na?tre et qui le verra mourir. Ce n'est point un sentiment comme notre patriotisme, sentiment qui para?trait au fougueux Bédouin d'une tiédeur extrême; c'est une passion violente et terrible; c'est en même temps le pre
ondamentale des sociétés modernes; mais est-ce que l'on parle sans cesse de changements et d'améliorations, quand on se trouve dans une situation normale, quand on se sent heureux? Cherchant toujours le bonheur sans le trouver, détruisant aujourd'hui ce que nous avons bati hier, marchant d'illusion en illusion et de mécompte en mécompte, nous finissons par désespérer de la terre; nous nous écrions dans nos moments d'abattement et de faiblesse que l'homme a une autre destinée que les Etats, et nous aspirons à des biens inconnus dans un monde invisible.... Parfaitement calme et fort, le Bédouin ne conna?t pas ces va
simple monothéisme auquel sont venues se joindre quelques institutions, quelques cérémonies empruntées au juda?sme et à l'ancien culte pa?en, c'est sans contredit de toutes les religions positives la plus simple et la plus dénuée de mystères; la plus raisonnable et la plus épurée, diraient ceux qui excluent le surnaturel autant que possible, et qui bannissent du culte les démonstrations extérieures et les arts plastiques. Dans la littérature, même absence d'invention, même prédilection pour le réel et le positif. Les autres peuples ont produit des épopées où le surnaturel joue un grand r?le. La littérature arabe n'a point d'épopée; elle n'a même pas de poésie narrative; exclusivement lyrique et descriptive, cette poésie n'a jamais exprimé autre chose que le c?té poétique de la réalité. Les poètes arabes décrivent ce qu'ils voyent et ce qu'ils éprouvent; mais ils n'inventent rien, et si parfois ils se permettent de le faire, leurs compatriotes, au lieu de leur en savoir gré, les traitent tout cr?ment de menteurs. L'aspiration vers l'infini, vers l'idéal, leur est inconnue, et ce qui, déjà dans les temps les pl
efois: arrachés par un prophète à leurs déserts et lancés par lui à la conquête du monde, ils l'ont rempli du bruit de leurs exploits; enrichis par les dépouilles de vingt provinces, ils ont appris à conna?tre les jouissances du luxe; par suite du contact avec les peuples qu'ils avaient vaincus, ils ont cultivé les sciences, et ils se sont civilisés autant que cela leur était possible. Cependant, même après Mahomet, une période assez longue s'est écoulée avant