Journal d'un sous-officier, 1870
iles allemands; mais, sur la crête du coteau, où naguère se trouvaient des quartiers opulents, il restait à peine quelques habitations debout, au milieu d'affreuses ruines. Le
sur la voie publique par les fenêtres du rez-de-chaussée, qu'ils obstruaient, et
obstinaient pourtant à r?der autour des décombres où gisaient encor
ient aux ruines les teintes rougeatres de l'incendie, et, la nuit venue, leur donnèrent un aspect fantastique. Et des canons roulaient avec fracas dans les rues le moins obstruées, où piétinait un régiment de cuirassiers attendant la sonnerie du boute-selle. Parmi
peu. Toutes les têtes se retournaient l'une après l'autre. Au milieu d'un silence recueilli, nous entend?mes, avant de rien voir, le pas d'un peloton qui arrivait en sens inverse. Il escortait des prisonniers prussiens en tête desquels marchaient deux athlètes, aux épaules larges, aux bras puissants, que dessinait un
t aggravé la blessure qui me déchirait le pied, et je me sentais frissonner de fièvre. Or il me fallut aller chercher du pain à la gare et l'attendre pendant deux heures. A mon retour, mes camarades avaient mangé leur soupe, mais le brav
colonel. Funeste avertissement. Quelques instants après, tente à bas, sac au dos et en marche. En contremarche, plut?t. Au bout d'une heure de promenade pénible dans les décombres, nous nous retr
tier. Une batterie pourtant était en position vers l'est. Quelques hommes, au risque de se rompre les os, s'étaient hissés au fa?te des ruines de la dernière maison br?lée. De cet observatoire branlant, ils découvraient la campagne jusqu'à la ligne de
ngt-quatre heures, sans sac il est vrai, avec un combat pour reprendre haleine, le Cid n'e?t guère fait plus; mais le 17e corps n'était pas composé exclusivement de héros pareils et les Prussiens valaient bien les Maures. Quoi qu'il en soit, notr
andant en chef s'effrayaient d'une telle ardeur chevaleresque. Après avoir renoncé à stimuler le zèle du général Durrieu, ils s'effor?aient de modérer l'activité de son successeur, lui télég
ment les vivres épuisés. Toujours le dernier servi, je revenais avec mes hommes chargés de viande, de café, de riz et de biscuit; mais
t-ce que j'avais le droit d'abandonner ces vivres, la nourriture de quatre jours? Mon tour était donc venu d'osciller comme un pendule, entre des partis qui me paraissaient également impraticables. C'est le bon c?té de la guerre d'exiger de l'initiative des plus
uri, semblait attendre des ordres. Ces ordres,-me ressaisissant aussit?t,-je les lui donnai. Il déchargea mes hommes de toutes nos denrées. Je
ans la plaine que nous avions parcourue l'avant-veille. Moi aussi, je cahotais, n'étant point
rragères, voitures d'ambulances, se heurtaient, sans hate. L'artillerie exigeant qu'on lui cédat le pas, c'était le commencement du chaos, que les ténèbres allaient achever. L'infanteri
a seule préoccupation, ma seule pensée, et je restais en conséquence auprès de mon convoyeur sans espérer pouvoir le suivre longtemps. Or un lieutenant de mon bataillon s
toute la voiture gémissait, craquait, comme un vaisseau dans la tempête. Le cheval hennissait de douleur, en donnant de furieux coups de collier, sous la pointe de la c
l'homme se désolant toujours. Quelques tra?nards nous affirmèrent d'ailleurs que nous suivio
rche effrénée, fantastique, troublait d'heure en heure le repos d'un village silencieux. Les fenêtres s'entr'ouvraient prudemment, puis des formes blanchat
marchais en titubant de fièvre, soutenu par le caporal Dariès. Il ne me quittait pas, persuadé que je serais tombé sans son
taine d'état-major passa près de nous: ?Lieutenant, dit-il à notre officier, su
re à moi de vendre ma vie; mais aurais-je assez de vigueur pour la vendre cher? Non, non; pour mourir dignement, utilement, il fallait ê
ercé par le mouvement de la marche, j'oubliai tout, Chateaudun détruit, la honte de la retraite, les menaces d'être fait prisonnier: je m'endormis, et il faisait grand jour quand je rouvris les yeux. Frais, dispos, la fièvre éteinte, le talon cicatrisé, j'étais sauvé, guéri, et désormais à l'épreuve. Sans les at
retraite, nous dit ce dernier, la compagnie avait été déployée en tirailleurs pendant la nuit, nouvelle qui fit bondir Nareval. Il se calma en apprenant que l
i, tout le monde était fourbu, rendu, et, dans cet état de lassitude extrême, chacun songeait à sa propre souff
chose de touchant dans son désespoir. Peut-être avait-il peur pour sa propre personne; mais, à coup s?r, il souffrait davantage à cause de son cheval. La pauvre bête, n'en pouvant plus, devait continuer à tra?ner son lourd fardeau. Le ma?tre la caressait, la flattait comme il e?t fait à un enfant, toutes les fois qu'un coup lui était administré par l'un
es. Les bivouacs fumaient et flambaient. Le terme de la retraite était atteint, Dieu merci. Le régiment campait à Saint-Laurent-des-Bois. Nareval, Dariès et moi, n
vue; il sut en tout cas nous retrouver, quoiqu'il feign?t de n'avoir plus sa tête. Feinte ou réalité, il se livra à de telles extravagances, qu'après lui avo