Le Petit Chose (part 1)
, comme dans toutes les villes du Midi, beaucoup de soleil, pas mal de
ée de platanes, et séparée des ateliers par un vaste jardin. C'est là que je suis venu au monde et que j'ai passé les premières, les seules bonnes années de ma vie. Aussi ma mémoire reconnaissante a-t-ell
re, m'a souvent conté depuis comme quoi mon père, en voyage à ce moment, re?ut en même temps la nouvelle de mon apparition
'abord nous e?mes donc le client de Marseille, puis deux fois le feu dans la même année, puis la grève des ourdisseuses, puis notre brouille avec
Une fois, on n'entra plus dans les salles du second. Une autre fois, la cour du fond fut condamnée. Cela dura ainsi pendant deux ans; pendant deux ans la fabrique agonisa. Enfin, un jour, les ouvriers ne vinrent plus, la cloche des ateliers né sonna pas, le puits à roue cessa de grincer, l'eau des
i, nous éti
une réputation de petit prodige. Grace à ce système d'éducation, je ne bougeais jamais de chez nous, et je pus assister dans tous ses détails à l'agonie de la maison Eyssette. Ce spectacle me laissa froid, je l'avoue; même je trouvai à notre ruine ce c?té très agréable que je pouvais gamb
vaise fortune, au lieu de l'abattre, l'exaspéra. Du soir au matin, ce fut une colère formidable qui, ne sachant à qui s'en prendre, [4] s'attaquait à tout, au soleil, au mistral, à Jacques, à la vieille Annou, à la Révolution, oh! surtout à la Révolution!... A entendre mon père, vous auriez juré que cette Révolution de 18.., qui nous avait mis à mal, était spécialement dirigée contre nous.
pain à voix basse. On n'osait pas même pleurer devant lui. Aussi, des qu'il avait tourné les talons, ce n'était qu'un sanglot, d'un bout de la maison à l'autre; ma mère, la vieille Annou, mon frère Jacques et aussi mon grand frère l'abbé, lorsqu'il venait nous voir, tout le monde s'y me
rieux, c'est qu'il n'avait rien. Il pleurait comme on se mouche, plus souvent, voila tout. Quelquefois M. Eyssette, exaspéré, disait à ma mère: "Cet enfant est ridicule, regardez-le!... c'est un fleuve." A quoi Mme Eyssette répondait de sa voix douce: "Que veux-tu, mon ami? cela passera en grandissant; à son age, j'étais comme lui." En attendant, Jacques grandissait; il grandissait
comme pour moi, notre r
our moi, n'était pas Rouget. Il était tour à tour mon fidèle Vendredi, une tribu de sauvages, un équipage révolté, tout ce qu'on voulait. Moi-même, en ce temps-là, je ne m'appelais pas Daniel Eyssette: j'étais cet homme singulier, vêtu de peaux de bêtes, dont on venait de me donner les aventures, master Crusoé lui-même. Douce folie! Le soir, après souper, je relisais mon Robinson, je l'apprenais par c?ur; le jour, je le jouais, je le jouais avec rage, et tout ce qui m'entourait, je l'enr?lais dans ma comédie. La fabrique n'était plus
fond de sa gorge, en agitant sa forte crinière rouge, auraient fait frémir les plus braves. Moi-même, Robinson, j'en a
jouant, j'appris à faire comme lui, et un jour, en pleine table, un formidable juron m'échappa je ne sais comment. Consternation générale! "Q
, mais il s'y conforma sans une plainte. Quelquefois je l'apercevais debout, sur la porte de la loge, du c?té des ateliers; il se tenait là tristement, et lorsqu'il voyait que je le regardais, le ma
, un matin, son père, fatigué de ses rugissements à domicil
sidence d'hiver, et me voilà, plus Crusoé que jamais, passant mes journées en tête-à-tête avec cet intéressant volatile et cherchant à lui faire dire: "Robinson, mon pauvre [8] Robinson!" Comprenez-vous cela? Ce perroquet, que l'oncle Baptiste m'ava
out à coup je vis venir de mon c?té un groupe de trois ou quatre personnes, qui parlaient à voix très haute et gesticulaient vivement. Juste Dieu! des hommes dans mon ?le! Je n'eus que le temps de me jeter derrière un bouquet de lauriers-roses, et à plat ventre, s'il vous
'arrêtaient et remuaient la tête. Toute ma crainte était qu'ils ne vinssent à découvrir mes résidences.... Que serais-je devenu, grand Dieu! Heureusement, il n'en fut rien, et au bout d'une demi-heure les hommes se retirèrent
le savoir
que la fabrique était vendue, et que, dans un mois, nous pa
e ciel croulait. La fabrique vendue!... Eh
M. Eyssette avait tout vendu; il fallait
r sur un navire, puis la permission qu'on m'avait donnée d'emporter mon perroquet avec moi. Je me disais
et de la vieille Annou. Mon grand frère l'abbé ne partait pas, mais il nous accompagna jusqu'à la diligence de Beaucaire, et aussi le concierge Colombe nous accompagna. C'est lui qui
ent d'aller à Lyon, mais qui sanglotait tout de même.... Enfin, à la queue de la colonne, venait Daniel E
u jardin pour la voir encore une fois.... Les platanes agitaient leurs branches en signe d'adieu..
n ?le le 30 s